"Douceur d'une vie, bientôt tu finis..."

Aryana est née à l'aube d'un jour de janvier, en Islande. Fille unique jusqu'à l'âge de ses 10 ans, elle n'eût pas une enfance malheureuse, bien au contraire : ses parents la chérissaient énormément, sans pour autant faire d'elle une enfant gâtée et capricieuse et à la naissance de sa petite soeur, ils fûrent encore plus fiers qui ne l'étaient déjà de leur fille, qui prenait son rôle de grande soeur très au sérieux. En dehors de ses parents et de sa soeur, la seule personne vivante de la famille Anfarwol était le grand-père maternel d'Aryana. Un homme bon et juste malgré tout les malheurs qu'il avait vécu.
Aryana adorait son grand-père et cela était réciproque. Doué de ses mains, il fabriquait à sa petite fille des dragons de bois magnifiques qui avaient le don de loger dans les yeux de l'enfant des étincelles de bonheur. Le jour de ses 10 ans, il lui offrit son premier poney, sous l'oeil attendri de ses parents. La petite Aryana était comblée, elle menait, selon elle, la meilleure vie du monde. Elle flottait dans une sérénité et un bonheur que peu d'enfants connaissaient réellement à son âge. Car, il ne faut pas oublier, c'est en apréciant les simples choses de la vie que l'on voit à quel point elle peut être belle et vaut la peine d'être vécue. Et cela, Aryana l'avait compris.

"Tout est sombre... Je crois que je suis en train de mourir."

Des hommes et des femmes, marchant tous vers la maison de la famille Anfarwol. Des torches allumées. Un grand fracas. Des cris...

-Tuez les, Tuez les tous ! Ils sont à l'origine de la maladie qui tue tous nos enfants !

- Ces Galdras vont payer ! Partisans de l'enfer !

- Vengeance !

Une douleur vive derrière le crâne. Une autre dans les côtes. Son visage en sang. Sa mère et son père se débattant, emmenés par des inconnus. Sa petite soeur tremblante par terre, les yeux révulsés. Elle meurt dans ses bras, après une lente agonie.

La nuit tombe. Le jour se lève. Trois fois.

Pourquoi ?...

Tout était si parfait...

Aryana se réveilla au milieu des décombres de sa maison. Elle ne pouvait plus bouger et avait atrocement mal. Un rayon de soleil éclaira son visage tuméfié, un filet de sang partant de la commissure de ses lèvres et coulant le long de son menton.

Une voix criait son nom dehors. Elle ne réagit pas. Elle était incapable de réagir. Pourquoi ? Pourquoi elle et non le reste de sa famille ? Pourquoi sa petite soeur, aussi douce et inoffensive qu'une légère brise d'été ? Pourquoi ses parents, honnêtes gens qui jamais n'auraient fait de mal, même au pire des monstres ?

Elle aussi aurait dû partir. Mais elle était restée et devait vivre. Injustement.

La voix se fît plus proche, mêlée de sanglots. Des larmes perlèrent au coin de ses yeux qui ne voyaient presque plus. Aryana avait reconnu la voix de son grand-père, pleine de douleur et de désespoir.

-Je suis là... Murmura t-elle d'une voix rauque, à peine compréhensible.

Elle l'entendit rentrer dans la maison et elle vit la joie sur son visage lorsqu'il la trouva. Il ne lui restait plus qu'elle...

Elle sombra de nouveau dans l'inconscience sur le chemin qui menait à la maison de son grand-père, juchée sur le dos de Nanuka, sa petite jument islandaise.

"Pourquoi ?..."

-Parce que le monde est mal fichu. Vous vous êtes juste trouvés au mauvais endroit au mauvais moment...

Aryana avait à peine formulé ce simple mot dans son esprit que son grand-père y avait déjà répondu. Elle ouvrit alors les yeux pour capter son regard.

Noir.

Tout était noir. Ce fût comme si ses paupières ne s'étaient jamais ouvertes.

Les larmes coulèrent longtemps quand elle comprit qu'elle avait perdu la vue. Son grand-père, quelques jours après le drame lui expliqua que le coup qu'elle avait reçu à la tête avait endommagé son système nerveux et la connexion entre son cerveau et ses yeux avait été perdue. Mais Aryana s'en contrefichait.

Elle devait mourir.

"Laisse moi partir, grand-père. La douleur est insupportable."

Durant des semaines, elle fît tout pour qu'on l'achève. Elle essaya même de s'achever elle même, plusieurs fois, mais inhabituée de sa nouvelle condition, elle échouait lamentablement, ce qui la mettait profondément en colère. Peu à peu, elle devenait complètement folle et sa fureur grandissante faisait croître la magie en elle. Jamais elle ne s'était manifestée encore, jusqu'au jour ou après un nouvel accès de fureur, Aryana déboussola tous les appareils électriques de l'hôpital qui la soignait, ce qui mit la vie en danger de plusieurs patients. Tantôt, elle voulait se donner la mort pour retrouver son bonheur passé, tantôt elle voulait que le monde entier paie pour ce que les habitants de ce maudit village avaient fait. Sa magie bouillait en elle et ne demandait qu'à sortir pour tout détruire. Cela lui faisait mal. Atrocement mal.

Mais moins mal que le dernier regard de sa petite soeur. Elle devait la rejoindre. Ou tuer tout le monde.

Mais dans chaque cas qui se présentait à elle, la Mort lui tenait la main...

Lettre de M. Edward Anfarwol à l'intention de la directrice de Residential Strange, Kaji Kaorii :

"Je vous supplie d'accueillir Aryana. J'ai entendu parler de votre école, accessible aux gens comme nous. Ceux qui ont été mis en marge de la société parce qu'ils étaient spéciaux. Une rumeur laisse entendre également que vous vous occupez très bien des cas dits spéciaux.
Rendez la heureuse, faites la revivre. J'ai prié mes dieux pour elle, ils semblent avoir tous disparus ou alors, ils sont comme ma pauvre petite-fille : ils n'écoutent plus.
Sauvez son âme. Je vous en supplie...
Ne la laissez pas mourir une nouvelle fois...

Ps : Il y a trois jours, durant la nuit, Aryana s'est volatilisé. Je l'ai su car le lendemain matin, elle portait une espèce d'énorme oeuf dans les bras et quelque chose semblait s'être réveillé en elle. Je n'ai jamais oser lui enlever l'oeuf, car elle est bien plus calme depuis qu'elle l'a trouvé. "